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PUCELLE
Précieuse pucelle
Sous sempiternelle tutelle
Languissante dans la citadelle
Où rôdent mille sentinelles
Tu ne rêves plus de faire la belle
D’une vie de Polichinelle
As-tu perdu la fibre rebelle ?
Est-ce sans appel ?
Ton corps d’algazelle
Sous l’assaut continuel
De privations cruelles
Répand des bouquets sensuels
faisant vibrer
Les cœurs arcs-en-ciel
Des fous romanichels
Aux élans passionnels
Aux dérives obsessionnelles
A qui tu inspires
De voluptueuses villanelles.
Adorable pucelle
Cette nuit inhabituelle
Dans les feux de tes prunelles
Je vois le chevalier providentiel
Ton reflet intemporel
Qui dans son étreinte fusionnelle
T’initieras aux frémissements charnels.*Nomad*
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*Ce n'est pas pour devenir écrivain qu'on écrit. C'est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour . . C'est même chose que d'aimer ou d'écrire. C'est toujours se soumettre à la claire nudité d'un silence. C'est toujours s'effacer.
*C'est très beau d'aller vers un solitaire, cela donne des frissons comme un animal sauvage et doux. Le malheur, c'est que si vous réussissez à attraper un solitaire,vous le perdez, il n'est plus seul.
*Les vrais artistes trouvent leur force dans ce qui les accable. D'un empêchement à vivre, ils font une grâce.
*Comment sortir de soi? Parfois cette chose arrive, qui fait que nous ne sommes plus enfermés: un amour sans mesure. Un silence sans contraire. La contemplation d'un visage infini, fait de ciel et de terre.
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SPLEEN
Aucun air ne défoule
Le dégoût spectre affreux
A peuplé d’échos creux
Mes vieux jours loin des foules
Empestant la nausée
L’âme mise en déroute
Assaillie par les doutes
Est comme névrosée
Victime de malaise
Tout en deuil d’émotions
Le cœur perd ses passions
Ne sent plus la fournaise
La raison sans clarté
Se morfond dans le spleen
Voit son joug qui décline
D’obscurs maux l'attenter
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Mieux vaut écrire pour soi et n'avoir pas de public plutôt que d'avoir un public et ne plus être soi-même.
Cyril Conroy
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Il n’y a pas la moindre sagesse dans ma vie. Pas non plus de folie. Je ne sais pas au juste ce qu’il y a dans ma vie. La vie peut-être, simplement. Et la solitude, sagesse et folie confondues. La solitude occupe ma maison à un point incroyable de sans gêne. Elle ne laisse rien en dehors d’ elle, sauf la page blanche. C’ est lorsque j’écris que je suis le moins seul. La solitude, quand elle monte dans un couple, est terrible, malfaisante. Quand elle entre chez moi, elle est – comment dire: détendue. Elle a ses habitudes, sa place faite. La solitude est une maladie dont on ne guérit qu’ à condition de la laisser prendre ses aises et de ne surtout pas chercher le remède, nulle part. J’ai toujours craint ceux qui ne supportent pas d’être seuls et demandent au couple, au travail, à l’ amitié, voire, même au diable ce que ni le couple, ni le travail, ni l’amitié ni le diable ne peuvent donner : une protection contre soi-même, une assurance de ne jamais avoir affaire à la vérité solitaire de sa propre vie. Ces gens-là sont infréquentables. Leur incapacité d’être seuls fait d’eux les personnes les plus seules au monde.
Christian Bobin, extrait de “L’épuisement”
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Au début du printemps, le calife, à Bagdad, donna joyeux festin sur la rive du Tigre.
Il gardait sous le voile une jeune beauté qui versait en chantant de sa bouche le sucre ; quand pareille à Vénus, elle prenait sa lyre, la lyre de Vénus devait faire silence.
Elle avait à l'égard d'un page du calife, brillant comme un soleil dans le ciel de l'amour, un tel attachement qu'elle en perdait l'esprit.
Ces amoureux étaient enchantés l'un de l'autre — ou plutôt, ils étaient possédés l'un de l'autre.
Mais les cent gardiens qui épiaient leurs gestes ne leur permettaient point d'être l'un avec l'autre.
Cette beauté voilée fut à bout de patience, dans le feu du désir, brûlant de solitude, et faisant sous le voile ouïr sa belle voix tout en l'accompagnant des accords de sa lyre.
Décrivant son amour en une poésie qu'elle mit en musique, elle chanta ceci :
« Ô ciel ! jusquas à quand seras-tu donc perfide, réduiras-tu mon âme, useras-tu ma vie ?
Jamais je ne sentis l'ardeur de ton amour.
D'être si peu aimée de toi, je suis honteuse.
Mieux vaut donc qu'un instant je m'occupe de moi, que je trouve un remède à ma condition. »
Au harem se trouvait une fille charmante qui, comme elle, savait déclamer et chanter.
« Partout des espions te surveillent », dit-elle,
« comment trouveras-tu le remède à tes maux ?
— Voici comment », dit-elle en retirant son voile.
Telle la lune qui se plonge dans le fleuve, comme un poisson, dans l'onde, elle s'abandonna.
Le page se trouvait posté tout près de là : par la séparation son âme était amère.
Quand la jeune beauté se jeta dans le Tigre, il la suivit, liant à son cou ses deux bras ; elle en fit tout autant et tous deux disparurent, fuyant ce qui distingue et le toi et le moi, quittant cet univers fait de dualité.
Ô Djâmi ! telle est la coutume de l'amour ; tel est l'amour réel ; le reste n'est que haine.
Si tu veux te tourner vers l'océan d'amour, comme ces deux amants, à toi-même, renonce.
Djâmi
(Hekmat)
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